Le pre Jean Gardin

 

Le père Jean Gardin, natif de Saint-Pois dans le Sud-Manche, et Tourlavillais d'adoption, est appelé par le Vatican, pour préparer la création d'un nouveau diocèse dans le nord du Congo-Brazzaville.

Le père Jean Gardin

un Manchois au Congo-Brazzaville

Pour les fêtes de fin d'année, le père Jean Gardin, religieux missionnaire de la Congrégation du Saint-Esprit ("Spiritain. dit-on usuellement, comme on dit pour d'autres Bénédictin ou Trappiste), prend un temps de repos dans une vieille demeure au Becquet de Tourlaville, là où se sont retirés ses parents. Son père était notaire à Saint-Pois, dans le Sud-Manche. C'est là que Jean est né il y a 59 ans. La vocation missionnaire ? "J'ai attrapé le virus spiritain à Noël 44" dit-il avec humour.

Un jeune prêtre, Victor Bouteiller, frère du curé de Saint-Pois, qui était religieux spiritain, était venu passer le Noël de cette rude année chez ses parents. Plus concrètement, c'est à l'âge de 12-13 ans qu'il a pris conscience d'un appel religieux, et, après des études au petit séminaire tenu par les Spiritains en Bretagne, s'est affirmé en lui le désir d'aller en Afrique. Il avait 19 ans : "J'avais rencontré des gens qui m'avaient parlé de l'Afrique. Le frère de ma mère y était dans l'administration française." C'est pourquoi à la fin de ses études, à l'âge de 24 ans, il demanda de faire ses années de coopération en Afrique, pendant le temps du service national. "J'ai été envoyé... à Saint-Pierre-et-Miquelon. J'étais prof dans un collège." En était-ce fini de sa vocation africaine ?

Non. Après quatre années de théologie au grand séminaire des missionnaires du Saint-Esprit à Chevilly-Larue dans la région parisienne (avec un enseignement qui l'ouvrait à la découverte des cultures africaines), il est ordonné prêtre le 29 juin 1969 à l'Abbaye Blanche à Mortain (où vivait une communauté spiritaine) et il est envoyé dans le nord du Congo-Brazzaville, rejoindre quelques frères dans les collines près de la frontière du Gabon. "Ce qui nous intéressait, dit-il, c'était de faire prendre conscience aux gens que leur foi faisait d'eux des hommes debout, actifs. On mettait en route des communautés chrétiennes dans les villages, et on accompagnait les gens dans des projets de développement" La paroisse d'Ewo que les Spiritains géraient était plus grande que le département de la Manche ! Il est resté 9 ans dans cette région.

Un apostolat en pirogue

En 1979, le père Gardin est appelé à descendre de ses collines pour aller vers le fleuve Congo réorganiser les paroisses sur un immense territoire long de 600 km. "J'avais hésité à cause... des moustiques !" De sa base, Mossaka, il a fait un ministère itinérant sur le Congo et l'Oubangui :"On partait en pirogue pour visiter les centres qui avaient des communautés chrétiennes. On organisait une session d'une quinzaine de jours, puis on revenait les voir six mois plus tard." Un peu comme sont liées les communautés animées au temps de saint Paul. "C'était un peu comme si on parcourait la distance du Havre à Brest en pirogue motorisée."

En, 1983, l'immense diocèse du nord du pays est divisé en deux diocèses. Le père Gardin quitte Mossaka pour lmpfondo, plus au nord, à 300 km sous la frontière centrafricaine. Même travail : l'évangélisation en pirogue, pendant dix ans : en même temps, que les gens construisent leur chapelle ils ouvrent ici et là une école, un dispensaire...

En 1995, le père Gardin change sa pirogue contre une 205 : il est responsable de l'animation missionnaire sur les six diocèses de Normandie avec Saint-Lô pour base (où il retrouve le père Bouteiller, le Spiritain de Noël, 44), puis il est nommé responsable des communautés de Spiritains dans l'Ouest de la France, de la Manche à Biarritz, et il anime la paroisse "Interpeuples" de Rennes : en comprend ce qualificatif quand on sait qu'à la Pentecôte 2000, 46 nationalités différentes étaient présentes lors de la célébration !

A nouveau au Congo, pour créer un diocèse

Ainsi, même en France, le père Jean Gardin n'était jamais loin de l'Afrique. Et cette année, le Vatican l'a appelé à nouveau pour le Congo, afin de travailler sur place à la création d'un septième diocèse dans le pays, celui d'Ouesso (une ville prés de la frontière du Cameroun), créer en 1983, se révélant ingérable : 120 000 km2 pour... 8 prêtres ! Les troubles dont le Congo-Brazzaville a eu à souffrir pendant près de trois ans à partir de 1997 avaient repoussé le projet.

Aujourd'hui le Saint-Siége a fait avancer le projet et a créé une "préfecture apostolique" dans le nord, sorte d'étape juridique avant la création du diocèse, dont il sera le titulaire : "Je connaissais bien la région. Et comme il n'y avait pas de prêtre congolais originaire de cette région, on a préféré appeler le missionnaire qui avait roulé sa bosse dans ces contrées." Il, va donc retrouver la ville d'lmpfondo où il avait passé dix années. Son travail ? Reprendre la pirogue pour organiser chrétiennement le territoire : appeler des prêtres, organiser les communautés chrétiennes en paroisses, bâtir à lmpfondo les structures nécessaires à un diocèse : un lieu de culte et de rassemblement, un évêché, etc. Jean Gardin, futur évêque africain ? "Non, dit-il. Ça fait vingt ans que tous les évêques sont des Congolais. Ce n'est pas à un Européen de prendre la charge nouvelle, même si l'Église est universelle."

Quand le diocèse sera créé, le premier évêque sera Congolais. Quand on s'appelle Jean, on se sent avant tout la vocation d'un précurseur ou d'un évangélisateur : on laisse à Pierre le soin de gérer.

J. M.

La Presse de la Manche dimanche 31 décembre 2000

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